Bloguer n’est pas tromper

La Cour d’Appel d’Orléans, par son arrêt du 22 mars 2010, vient rappeler que si un blog politique et humoristique critiquant un député-maire s’inscrit bien dans une ligne pamphlétaire, il n’en reste pas moins que sa présentation, de nature à tromper les internautes sur les intentions manifestes du blogueur, constitue une faute.

En l’espèce, un auteur anonyme créé un blog qu’il dépeint comme étant celui des sympathisants du député-maire, sans dénoncer sa teneur humoristique. Ce dernier entreprend des démarches afin de découvrir la personne à l’origine de ce blog et finit par découvrir que celui-ci n’est autre qu’un attaché territorial, inscrit dans une liste concurrente du député-maire. Celui-ci saisit alors le juge des référés du Tribunal de grande instance d’Orléans, en son nom personnel et en sa qualité de maire et de député, sur le fondement des dispositions de l’article 1382 du code civil.

Par une ordonnance de référé du 8 octobre 2008, les juges du TGI décident de la fermeture du blog dans les quinze jours sous astreinte tout en condamnant le blogueur anonyme à un euro de dommages et intérêts sur les fondements de la responsabilité civile et à trois mille cinq cents euros pour les frais de justice. De plus, ces mêmes juges déboutent le blogueur de sa demande de requalification des faits aux fins de sanctionner un abus de la liberté d’expression relevant de la loi du 29 juillet 1881.

La Cour d’Appel d’Orléans vient confirmer cette décision tout en réduisant la condamnation pour les frais de justice à deux milles euros et en maintenant la publication judiciaire d’un montant de deux milles euros.

Pour les juges de la Cour d’Appel, le blogueur ne pouvait invoquer à son profit une jurisprudence du 29 juillet 2000[1], dans laquelle les abus de la liberté d’expression sont de la compétence spéciale de la loi du 29 juillet 1881 sur les infractions de presse et ne peuvent être réparés sur les fondements de l’article 1382 du code civil. Ils retiennent justement que le blog ne conduisait ni à de la diffamation ni à des injures, seuls délits qui auraient pu être invoqués en l’espèce.

En outre, les juges de la Cour d’Appel estiment qu’en se servant de l’ordinateur mis à sa disposition par son employeur ainsi qu’en « brouillant les pistes »  tout en gardant son anonymat, le blogueur ne permettait pas une réponse du député-maire et faussait par conséquent le débat politique.

Dans le contexte actuel de proposition de loi discutée au Sénat et sensée associer le statut du blogueur anonyme à celui des professionnels de la publication, on constate que tout n’est donc pas permis à un blogueur, même anonyme, et que ces derniers peuvent être retrouvés et traduit devant les tribunaux lorsqu’ils excèdent leurs droits et devoirs.

  • Sources :

–       Legalis.net, 28/05/10, cliquez.

Jorge Gregorio