Je souhaite sous-traiter la conception de mon site Web auprès d’une « web agency ». Mon objectif est commercial ; afin de rendre mon site le plus attractif possible, j’ai demandé à mon prestataire d’intégrer des éléments visuels, sonores et textuels.
Quelles sont les précautions juridiques à prendre ?
Les éléments visuels, sonores et textuels qui constituent le site Web sont protégés par le droit d’auteur s’ils sont originaux (cf. Fiche sur le droit d’auteur et décision du TGI Paris, ord.réf., 27/09/00). La question de la cession de ces droits d’auteur à l’entreprise commanditaire du site est essentielle : de manière générale il convient de veiller tout particulièrement à la rédaction de la clause de cession de droits.
1. Hypothèse de la cession des droits d’auteur appartenant au créateur du site (web agency)
Le prestataire qui conçoit le site est titulaire des prérogatives de droit d’auteur sur les créations originales constituant le site :
- la charte graphique, les créations graphiques, textuelles, sonores ou visuelles ;
- ainsi que sur les éléments logiciels grâce auxquels le site fonctionne.
En tant que commanditaire, l’indépendance et la liberté de modification future du site constituent des questions majeures qu’il convient de traiter en obtenant la cession totale des droits d’auteur appartenant au prestataire : pour toute la durée des droits, pour le monde entier et sur tous supports. L’article L. 131-4 du CPI prévoit que la cession peut être totale ou partielle. Dans ce dernier cas, il faut au minimum obtenir un transfert des droits de représentation, de diffusion, de reproduction et d’exploitation.
Le commanditaire devra également obtenir la cession des sources des développements logiciels ou programmes réalisés pour faire fonctionner le site.
Conformément aux termes de l’article L 131-3 du CPI, le contrat écrit devra préciser la durée de la cession, le lieu et le mode d’exploitation de l’ ?uvre.
2. Hypothèse de la cession des droits d’auteur portant sur des ?uvres préexistantes
Le site Internet peut également être constitué d’ ?uvres originales préexistantes telles que des photos, des textes, des images, des musiques ? Les droits d’auteur sur ces ?uvres devront également être cédés soit au créateur du site, soit au commanditaire du site si c’est lui qui les fournit en vue de leur intégration par le prestataire. Dans le premier cas, le contrat de création de site devra contenir une clause spéciale de « garantie de contrefaçon » ou de « jouissance paisible » : le créateur du site garantit ainsi à son client qu’il a obtenu la cession de l’intégralité des droits sur ces ?uvres préexistantes. Puis il lui cèdera ces droits.
S’agissant des photos, le commanditaire devra soit s’assurer qu’elles sont de libre parcours, soit obtenir la cession des droits d’auteur portant sur celle-ci. Attention, ce n’est pas parce qu’une image circule sur Internet qu’elle est de libre parcours. Il convient également de veiller au respect du droit à l’image et à la vie privée de la personne représentée sur la photo (cf. fiche sur le droit à l’image).
Plusieurs décisions de jurisprudence sont intervenues sanctionnant créateurs ou hébergeurs de sites pour diffusion de photos sans autorisation préalable des personnes représentées :
- TGI Paris ord. réf., 6 déc. 2000, Charlotte Rampling c/le journal « vois ça ».
- TGI Nanterre, ord. réf., 8 déc. 1999, Madame L.c/les sociétés Multimania production, France Cybermédia, SPPI, Estérel.
3. Hypothèse de la cession des droits d’auteur portant sur des créations de salariés du propriétaire du site
Contrairement à une idée reçue, le contrat de travail n’emporte pas cession automatique des créations du salarié au bénéfice de l’employeur.
Ainsi, une entreprise faisant appel à ses salariés pour la conception graphique, visuelle, textuelle ou sonore d’un site, devra s’assurer que les contrats de travail de ses salariés comportent bien la cession expresse à son profit des droits d’auteur. A défaut, il faudra faire signer un contrat de cession de droits d’auteur spécifique avec cession de leurs droits de reproduction et de représentation sur Internet.
En revanche, si la société créatrice du site Internet est une société proposant des services informatiques disposant en interne des moyens humains permettant de réaliser la partie logicielle du site : alors les droits d’auteur ainsi créés sur les logiciels, appartiennent à la société conformément aux dispositions de l’article L. 113-9 du CPI qui prévoit « Sauf stipulations contraires, les droits patrimoniaux sur les logiciels et leur documentation créés par un ou plusieurs employés dans l’exercice de leur fonction ou d’après les instructions de leur employeur sont dévolus à l’employeur qui est seul habilité à les exercer ».